Wednesday, August 09, 2006

Français - samedi 05 - lundi 07 août 2006

Fabius dénonce une "faute" de Douste-Blazy sur l'Iran

PARIS (AFP) - L'ex-Premier ministre PS Laurent Fabius a dénoncé vendredi une "faute" de Philippe Douste-Blazy sur le rôle de l'Iran au Proche-Orient.
"La responsabilité d'Israël dans la tragique destruction du Liban ne doit pas faire oublier celle du Hezbollah, donc de l'Iran", écrit le député socialiste de Seine-Maritime dans un communiqué.

"C'est pourquoi la formule récente du ministre selon laquelle ce pays jouerait +un rôle important de stabilisation de la région+ constitue une faute, alors que le régime iranien poursuit sa très grave nucléarisation".

"A la différence de l'administration Bush qui jusqu'ici bloque scandaleusement tout cessez-le-feu, le gouvernement français doit chercher à dialoguer avec toutes les parties pour faire avancer d'urgence la paix, mais il ne doit pas travestir la réalité par des propos erronés et complaisants", ajoute M. Fabius, candidat à l'investiture PS pour 2007.

Le ministre des Affaires étrangères Philippe Douste-Blazy avait déclaré lundi à Beyrouth, avant de rencontrer son homologue iranien Manouchehr Mottaki, que "dans la région, il y a un grand pays comme l'Iran qui est respecté et qui joue un rôle important de stabilisation".

Après l'émoi suscité par ces propos, il les avait recadrés en soulignant qu'il cherchait à mettre l'Iran devant ses responsabilités, et en déclarant: "Téhéran doit jouer un rôle de stabilisation et non de déstabilisation".

dimanche 06 août 2006

L'Iran rejette la résolution de l'ONU pour suspendre l'enrichissement

TEHERAN (AFP) - L'Iran a rejeté dimanche la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies lui demandant de suspendre son enrichissement d'uranium d'ici au 31 août, et a même annoncé une expansion de son programme nucléaire.

"Nos activités sont en accord avec le Traité de non-prolifération (TNP) et, en conséquence, l'Iran n'accepte pas la suspension de son enrichissement" d'uranium, a déclaré Ali Larijani, le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale et principal négociateur du dossier nucléaire iranien, dans une conférence de presse.

La déclaration de M. Larijani est la première réaction d'un haut responsable iranien à la résolution du Conseil, adoptée le 31 juillet, qui donne un mois à l'Iran pour suspendre notamment toutes ses activités d'enrichissement, faute de quoi il envisagera l'adoption de sanctions pour l'y contraindre.

En même temps, M. Larijani a laissé la porte entrouverte à une suspension, en affirmant que Téhéran considérait toujours une offre des grandes puissances visant à ce qu'il suspende son enrichissement, et à laquelle il doit répondre le 22 août.

Malgré cela, le responsable a expliqué que l'Iran "étendra son programme nucléaire selon ses besoins", et que les installations d'enrichissement, constituées de cascades de centrifugeuses, "seront étendues".

Téhéran a redémarré ses activités d'enrichissement en janvier dernier, et a annoncé en avril avoir produit de l'uranium enrichi.

Les grandes puissances craignent que la République islamique utilise ce procédé, qui permet d'obtenir du combustible pour une centrale nucléaire, afin de se doter de l'arme atomique.

L'Iran a déjà ignoré une résolution de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), et une déclaration présidentielle du Conseil de sécurité des Nations unies, lui demandant de suspendre ses activités nucléaires sensibles et de reprendre une coopération élargie avec l'AIEA.

Son rejet de la résolution du Conseil ne signifie pas pour autant, à ce stade, celui de l'offre des grandes puissances pour suspendre l'enrichissement, selon les propos de M. Larijani.

Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie) et l'Allemagne ont proposé le 6 juin à l'Iran de suspendre son enrichissement, en échange d'un ensemble de mesures de coopération dans les domaines commercial et du nucléaire.

La direction iranienne avait indiqué qu'elle répondrait à cette offre le 22 août, et M. Larijani a confirmé cette date, en expliquant que "l'Iran est proche d'une conclusion" à ce sujet.

Cependant, il a estimé que le "contenu de la résolution (du Conseil de sécurité, ndlr) est négatif et a gâché l'opportunité" représentée par l'offre. Cette résolution a "affecté notre attitude" à l'égard de l'offre, a-t-il insisté.
Il est allé jusqu'à considérer que "la question n'est pas de savoir ce que sera la réponse de l'Iran", à l'offre des grandes puissances, mais de "préparer le terrain et l'atmosphère pour poursuivre le processus" des négociations.

Revenant sur la résolution adoptée le 31 juillet, il a d'abord affirmé qu'elle n'avait "aucune valeur légale", avant de nier avoir dit une telle chose.
"J'ai dit qu'elle n'avait pas de crédibilité légale, que c'était une résolution politique", a assuré le responsable.

Il a aussi mis en garde contre l'adoption de résolutions futures, en expliquant qu'aucune d'entre elles "n'influencera le programme atomique iranien".

"Nous allons développer notre technologie nucléaire", a-t-il répété, en ajoutant que l'Iran "ne restreindra pas les inspections" que mènent les inspecteurs de l'AIEA, mais que les grandes puissances ne devraient pas "faire des choses qui amèneraient l'Iran dans cette voie".

lundi 07 août 2006

L'Iran et la Syrie battent les tambours de la guerre
http://www.memri.org/

Ces derniers jours, de hauts responsables iraniens et syriens, dont le président syrien Bashar Al-Assad, ont haussé le ton au sujet de la guerre, suivis des porte-parole du régime syrien. Extraits :

Le commandant des Gardiens de la Révolution : nous devons préserver la haine de l'Amérique dans nos cœurs jusqu'à l'heure de la vengeance
L'Agence de presse iranienne conservatrice "Fars" rapporte que le commandant des Gardiens de la Révolution, Yahya Rahim Safavi, a donné un discours devant les forces des Gardiens de la Révolution et le Basij (1) le 30 juillet 2006, leur demandant de se préparer à agir contre Israël et les Etats-Unis :

"J'espère que notre grande et courageuse nation parviendra un jour à se venger d'Israël et de l'Amérique, du sang des musulmans opprimés et des martyrs.

Nous considérons que l'Amérique est également responsable de la mort des 200 000 martyrs de la guerre (Iran-Iraq) qui nous a été imposée, vu qu'elle a poussé Saddam (Hussein) à attaquer l'Iran. Nous devons laisser cette haine sacrée brûler dans nos cœurs jusqu'à l'heure de la vengeance.

Vu les crimes et l'oppression sionistes, je demande à Dieu de hâter le temps de la fin de ce régime… Les sionistes hâtent leur propre mort par leurs actions infâmes, car le Hezbollah et le peuple libanais tiennent bon.

Il est nécessaire de renverser le régime sioniste factice, cette tumeur cancéreuse (appelée) Israël, fondée dans le but de piller les ressources et les richesses des musulmans." (2)

Le quotidien londonien en langue arabe Al-Qods Al-Arabi, sur la base des affirmations de l'Agence de presse Fars, cite Safavi disant que "les Gardiens de la Révolution et le Basij (…) doivent se tenir prêts à réagir contre Israël et les Etats-Unis. Le Guide suprême (l'Ayatollah Khamanei) vous dira quand le moment sera venu d'agir." (3)

Le président syrien Bashar Al-Assad : "Le temps est maintenant à la résistance populaire. Le bataille continuera tant que notre terre sera occupée et que nos droits seront usurpés."

A l'occasion du 61ème anniversaire de la création de l'armée syrienne, Bashar Al-Assad a publié une lettre adressée à l'armée. En voici des extraits, tels que cités par le quotidien syrien gouvernemental Al-Thawra :

"L'anniversaire de la création de l'armée (syrienne) a lieu cette année au beau milieu de circonstances internationales qui nous posent des défis régionaux, nous obligent à être prudents et alertes et à nous préparer.

En effet, la guerre barbare et destructrice que l'ennemi sioniste mène contre notre fier peuple arabe au Liban et en Palestine est de plus en plus cruelle. Notre sœur le Liban est sujette à une attaque déclarée de la machine de guerre israélienne, par voies maritime, terrestre et aérienne. L'ennemi commet les plus horribles formes de meurtres et de destructions matérielles, n'épargnant personne, ni aucune pierre, installation ou infrastructure.

Une partie de sa bataille et de son agression est basée sur la falsification des faits et de la vérité. Bien qu'il y ait quelqu'un qui facilite ses plans et défende ses déclarations, le pouls des peuples est plus fort et leur cœur continue de battre. Le temps est à présent à la résistance populaire et nationale. Cette résistance a réussi à humilier les occupants, à détruire leur prestige en Irak et en Palestine, et aujourd'hui au Liban, et elle a prouvé au monde que la force de la vérité dépasse l'assurance de la puissance occupante.

C'est Israël qui a commis et commet encore l'agression. C'est Israël qui prend des nations en otage. C'est Israël dont les prisons comptent des milliers de prisonniers. C'est Israël, plus que quiconque, qui occupe nos terres arabes en Palestine, sur les Hauteurs du Golan et au Liban sud.

Ces combattants de la résistance, et ce peuple, se battent pour libérer leurs terres et leurs pays. Ils se battent pour défendre leur terre et leur honneur. Ils n'ont d'autre étendard que celui de la victoire et ils ont prouvé que la victoire commence par une position ferme et noble, continue par la dénonciation des agents qui ont abandonné (leurs frères arabes) et se termine par la libération.

La Syrie, qui s'est toujours tenue du côté de ses frères et a sacrifié des rangées de martyrs pour défendre la liberté du Liban exactement (comme elle a défendu) la liberté de la Syrie, est aujourd'hui – comme autrefois – la force la plus puissante et la plus déterminée à se tenir auprès de notre peuple arabe résolu, qui se bat au Liban et en Palestine, et auprès de la résistance libanaise héroïque qui a frappé l'ennemi dans sa propre base. Tous ces cris menaçants que les forces de l'hégémonie, qui soutiennent l'agression, font entendre, ne nous dissuaderont pas de poursuivre notre chemin sur la voie de la libération, du soutien à nos frères, de l'aide à la résistance.

Assad a appelé les forces armées, toutes les brigades et les unités, à redoubler d'efforts lors des entraînements et à se préparer le mieux possible, affirmant : "Bien que nous pensions que le martyre est le chemin de la liberté et de la victoire, nous devons croire que chaque effort et chaque goutte de sueur versée aujourd'hui lors des entraînements épargnera une goutte de sang le moment venu. La bataille continuera tant que notre terre sera occupée et nos que nos droits seront usurpés. Nous serons victorieux, avec l'aide d'Allah." (4)

Le directeur d'un quotidien gouvernemental syrien : chacun doit décider dans quelle tranchée il se battra – celle d'Israël, ou celle de la résistance
Un éditorial publié par Dr Khalaf Al-Jarrad, directeur du quotidien gouvernemental Techrine, affirme : "Les planificateurs stratégiques, les décisionnaires, les (commandants) de guerre de l'entité sioniste et de ses partisans doivent apprendre à connaître la nature de cette région, la signification du martyre et de l'honneur chez les peuples de la région, (…) (et alors) ils comprendront que leurs guerres cruelles, les dommages, la destruction et les tueries infligées à notre peuple en Iraq, en Palestine et au Liban, ne leur apporteront rien et ne conduiront pas notre nation vers la défaite et la capitulation. Au contraire, elles pousseront des millions d'Arabes, de différents pays, à rejoindre la résistance, à prendre les armes et à combattre le sionisme (…)

L'histoire est sans pitié. Tous dans cette nation – et en particulier les dirigeants – doivent choisir dans quelle tranchée ils se battront. Ce sera soit la tranchée d'Israël, du sionisme et des Etats-Unis - dirigée par les néo-conservateurs, avec ses mouvements de droite racistes et les forces et organisations qui les soutiennent – au niveau militaire, politique, économique, intellectuel, diplomatique et idéologique ; soit la tranchée de la résistance, qui défend la terre, les droits, l'honneur, l'histoire et l'identité, et avec elle toutes les forces de la résistance – arabes, islamiques et internationales.

Il n'y a pas d'autre choix possible dans cette équation existentielle décisive de l'histoire." (5)

Un ministre syrien : "Maintenant que le mythe légendaire de la supériorité israélienne a été brisé…"

Les ministre syrien des expatriés, Buthaina Shaaban, écrit dans le quotidien gouvernemental Techrine, ainsi que dans le quotidien libanais Al-Sharq Al-Awsat : "Il est clair que le désarmement de la résistance (le Hezbollah), la destruction de l'Irak, le déchiquètement du peuple irakien et la menace dirigée vers la Syrie, sont les objectifs de la création d'un nouveau Moyen-Orient, avec son identité sioniste et occidentale (…) Les Arabes doivent comprendre aujourd'hui que 'tout ce qui les rassemble est juste, et tout ce qui les désunit est mal.' C'est pourquoi la bataille est longue – être ou ne pas être, tel est son enjeu.

(Condoleezza) Rice avait raison quand elle a dit qu'il n'y aurait pas de retour à la situation d'avant la guerre. Même si Rice et Israël voulaient revenir en arrière, la fin du mythe de la supériorité d'Israël, et l'explosion de la frustration causée par Israël feront que les Arabes ne pourront plus accepter l'humiliation, l'infériorité et le désespoir qui régnaient (avant la guerre).
Il ne fait aucun doute que le Moyen-Orient se trouve aujourd'hui au beau milieu de contractions d'accouchement. Mais ce sera la naissance d'un monde arabe dirigé par ses nobles fils, qui connaissent leurs intérêts, sont fiers de leur passé, de leur présent, de leur avenir, et se sacrifient pour que leurs enfants aient un avenir honorable où l'unification et la coopération arabes seront réalisées, afin que la voix arabe domine dans l'arène internationale (…)" (6)

Le directeur d'un quotidien gouvernemental syrien prend à partie les dirigeants arabes : vous pouvez boire votre café en humant l'arôme des enfants de Cana.

Le directeur du quotidien gouvernemental syrien Al-Thawra, Abd El-Fattah Al-Awadh, écrit : "Ô vous dirigeants arabes, rationalistes, pragmatistes et colombes de la paix, vous pouvez boire votre café du matin en humant l'arôme des enfants de Cana. Vous pouvez continuer de trinquer à la paix avec Rice, et à confectionner avec la peau des victimes des robes pour certains d'entre vous, des cravates pour d'autres et des souvenirs du Liban.

Qui prendra Israël à partie ? Qui osera ? L'histoire israélienne, qui regorge de massacres, manifeste sa nature agressive et barbare, qu'il est impossible de changer à la façon des sages dirigeants (arabes). Elle ne peut être changée que par la mentalité des 'aventuriers', ces combattants de la résistance (…)
Notre réponse est : Toutes les victimes sont nos enfants. Le père peut-il pardonner à l'assassin de son fils ?" (7)

[1] Pour en savoir plus sur l'Iran, voir MEMRI Inquiry and Analysis Series No. 262, 1er février 2006, http://memri.org/bin/articles.cgi?Page=archives&Area=ia&ID=IA26206.

[2] Fars, 30 juillet 2006. http://www.farsnews.com/newstext.php?nn=8505080619

[3] Al-Quds Al-'Arabi (Londres), 30 juillet 2006.

[4] Pendant les festivités de l'Ashura, le chiites célèbrent le martyre de Hossein, petit fils du Prophète Mahomet, abattu par le Sunnite Yazid bin Muwayya lors de la bataille de Karbala en 680, lequel a, selon eux, usurpé le pouvoir à la Maison d'Ali. Le mois de l'Ashura a été transformé par le fondateur de la Révolution islamique d'Iran, l'ayatollah Ruholla Khomenei, en symbole du soulèvement des minorités contre les puissants oppresseurs.

[5] YaYazid, dirigeant sunnite de la maison d'Umayya, est l'assassin d'Hussein. Pour les chiites, Hussein devait être le dirigeant plutôt que Yazid. La bataille de Karbala marque la division dans le monde islamique entre les sunnites et les chiites.

[6] ISNA, 1er août 2006. http://www.isna.ir/Main/NewsView.aspx?ID=News-762856&Lang=P

[7] Kayhan (Iran), 1er août 2006. http://www.kayhannews.ir/850510/2.htm#other201

[8] Al-Thawra (Syrie), 1er août 2006.

[9] Techrine (Syrie), 31 juillet 2006.

[10] Techrine (Syrie), 31 juillet 2006 ; Al-Sharq Al-Awsat (Londres), 31 juillet 2006.

[11] Al-Thawra (Syrie), 1er août 2006.

lundi 07 août 2006
Pourquoi les Français sont si prévenants vis-à-vis du Hezbollah ?
www.topchretien.com/topinfo

Weekly Standard Olivier Guitta, consultant en politique étrangère et contre-terrorisme à Washington

La France a une longue histoire au Liban, un pays qu’elle a administré en vertu d’un mandat de la Société des Nations entre 1920 et 1943. L’élite libanaise est d’ailleurs parfaitement bilingue français et arabe. La France a aussi une longue histoire avec le Hezbollah, qui remonte aux origines du groupe il y a plus de 20 ans.

Pour comprendre pourquoi le président français Jacques Chirac est si peu empressé à désarmer le Hezbollah dans la crise actuelle, il convient de regarder le passé. Les 241 soldats US morts dans l’explosion du 23-10-83 ne furent pas les seuls occidentaux à mourir au Liban sous les mains des islamistes.

Pour débuter, remontons à 1978, lorsque la France a contribué à l’instauration de la FINUL, une force de l’ONU créée pour surveiller la frontière israélo-libanaise. Après un nombre important de violations des frontières par les palestiniens ayant tué des israéliens, l’armée israélienne avait pénétré au Liban pour repousser l’OLP au Nord du fleuve Litani.

La FINUL avait pour mission de maintenir la paix mais celle ci n’a pas duré. En 82, après une autre incursion israélienne, 800 soldats français rejoints par autant de US Marines et 400 italiens débarquèrent au Liban pour veiller à l’évacuation de l’OLP et servir encore une fois de force de maintien de la paix. La même année naissait officiellement le Hezbollah du Liban.

A peine créée par l’Iran, cette nouvelle force chiite prit les forces françaises au Liban pour cible. D’abord par une attaque à la roquette en Avril 1983, puis en Août par le détournement d’un avion d’Air France à Téhéran. Les pirates de l’air qui étaient membre d’un groupe terroriste lié à l’Iran, le Amal Islamique, demandèrent le retrait de la France du Liban et la fin de l’aide militaire française à l’Irak (alors en guerre contre l’Iran) ainsi que la libération de tous les prisonniers libanais des prisons françaises.

Le cerveau de cette opération était Hussein Moussawi, qui s’attaqua ensuite aux baraquements américains et français de Beyrouth, faisant 241 morts parmi les Marines et 58 dans les rangs de l’armée française. Deux semaines plus tard, la DGSE apprenait que l’ambassade iranienne à Beyrouth avait ordonné l’exécution de Gilles Vidal, le n°2 de l’ambassade française. La DGSE décida d’une opération préventive: elle remplit de 500 kilos une jeep militaire française frappée de la croix rouge et la gara au pied de l’ambassade iranienne.

La mise à feu ne se fit pas et les agents français tentèrent alors de la faire exploser au bazooka mais sans plus de résultats. Les iraniens découvrirent la jeep et avec elle la preuve de la responsabilité française.

Le lendemain Téhéran pointa du doigt la France, un membre influent du parlement iranien, l’hodjatoleslam Mohamed Ali Mohavedi Kermani s’exclama alors et en public: «les français sont si trouillards qu'ils ne sont pas foutus de trouver quelqu'un parmi eux prêt à être martyr et se faire exploser avec cette jeep devant notre ambassade de Beyrouth. Seuls les agents du Hezbollah sont capables d'en avoir le cran».

C’était la guerre. En représailles la France bombarda l’Amal Islamique et un camp du Hezbollah à Baalbek. On discute encore au sujet du succès de l’opération. Alors que certains prétendent que pas un seul terroriste ne fut tué, un rapport secret adressé à François Mitterrand établissait qu’il y avait eu 20 militants chiites tués (39 selon l’armée libanaise) ainsi que 12 formateurs iraniens. l’ayatollah Khomeiny dénonça la France comme un «état terroriste».

La vengeance de l’Iran ne fut pas longue à venir. Le Hezbollah bombarda l’ambassade française au Koweït le 12 Décembre puis tua 10 soldats français au Liban.Le 21 Décembre, après une attaque sanglante au camion piégé contre les positions françaises, le Jihad Islamique (un autre nom du Hezbollah) annonça qu’il en était l’auteur et donnait dix jours à la France pour quitter le Liban ou subir d’autres représailles.

Le 23, Paris expulsait 6 diplomates iraniens suspectés d’activités terroristes. Le 31 Décembre, tenant sa promesse, le Djihad Islamique fit exploser simultanément la gare de Marseille et le TGV Paris Marseille, faisant 4 morts parmi la population française.

En 1984, à la grande satisfaction du Hezbollah, la France quitta le Liban définitivement. Mais une fois encore l’Iran ordonna au Hezbollah de viser la France à cause de son soutien à Saddam Hussein. Entre Mars 1985 et Janvier 1987, le Hezbollah prit 16 français en otage au Liban, pour la plupart des journalistes ou des diplomates. Certains restèrent captifs durant trois longues années et l’un d’eux fut assassiné.

Se vantant du soutien de l’Iran dans ses activités, le «guide spirituel» du Hezbollah, le cheikh Fadlallah, cité par le journal Libération annonça: «La France est devant une chambre forte. Il y a trois clefs, la plus petite est libanaise, donc si je tenais vos compatriotes je ne pourrais pas les libérer, ma petite clef ne suffit pas.

La clef syrienne est plus grande mais n'est pas suffisante non plus. Il vous faut aussi la troisième clef, celle de l'Iran».

En plus des kidnappings, l’Iran via le Hezbollah orchestra aussi une campagne de terreur au sein des villes françaises entre Décembre 85 et Septembre 86 qui fit 13 morts et blessa des centaines de personnes. Alain Marsaud, responsable du contre-terrorisme français, résume ainsi cette campagne: «L'Iran est le commanditaire des attaques et se sert du réseau du Hezbollah basé au Liban et d'une cellule logistique de maghrébins pour convaincre la France de changer sa politique étrangère».

Et dans les faits, le cerveau tunisien des attaques de 1986, Fouad Ali Saleh, était très proche de certains dirigeants du Hezbollah. Il avait passé trois années à étudier à Qom (Iran) sous l’ayatollah Khomeiny. Après son arrestation, Saleh déclara: «La forteresse de l'islam est l'Iran. Votre pays, en aidant l'Irak combat l'Iran, et est donc un ennemi... notre principal objectif est de ramener la France à la raison par des actions violentes».

La DST dans un rapport final au premier ministre Jacques Chirac écrivit: «Rien n'a été décidé sans la bénédiction de président du parlement iranien Rafsandjani ou de l'ayatollah Montazéri».

Par comparaison les années 90 furent plutôt calmes. Mais en Février 2000, le premier ministre Lionel Jospin décrivit le Hezbollah comme un groupe terroriste lors d’une conférence de presse en Israël. Son ministre des affaires étrangères qui voyageait avec lui, Hubert Védrine, lui chuchota tout de suite qu’il était allé trop loin dans ses paroles. A la suite de quoi le président Jacques Chirac, en colère, lui rappela que c’était le président qui décidait de la politique étrangère de la France et non pas le premier ministre.

De toute évidence, Chirac se souvenait des attentats et kidnappings des années 80 et ne voulait pas provoquer le Hezbollah. Ce qui explique pourquoi et en dépit du passé sanglant d’Hassan Nasrallah, Chirac l’invita en tant que secrétaire général du groupe à s’occuper du sommet de la francophonie de Beyrouth en Octobre 2002.

Mais le 17 Décembre 2003, les relations à moitié chaleureuses de Chirac avec le Hezbollah s’effondrèrent. En soutenant l’interdiction du voile que portaient des femmes islamistes dans les écoles françaises, Chirac déclencha la colère du cheikh Fadlallah. Dans une lettre à Chirac, Fadlallah le menaça de «probables ennuis» si l’interdiction était légalisée, ce qui advint en 2004.
Dans les dernières années, il y a eu quelques ambiguïtés dans la politique française vis à vis du Hezbollah.

Ainsi en Mai 2004, Jean Daniel Levitte, ambassadeur de France aux USA, a décrit le Hezbollah comme une organisation essentiellement sociale. En outre il a ajouté qu’il ne voyait aucune raison à mettre le Hezbollah sur la liste des terroristes de l’Union Européenne.

Néanmoins en Août 2004, la France et les USA soutinrent conjointement la résolution 1559 des Nations Unies appelant au retrait des troupes syriennes du Liban et au désarmement des milices y compris le Hezbollah; même si les français sur ce second point se protégèrent en faisant préciser que le Hezbollah ne pouvait être désarmé que par les autorités libanaises.

Et à l’intérieur, la France prendra quelques mesures unilatérales contre le Hezbollah. Notamment en Décembre 2004 où la France interdira Al-Manar, la chaîne de télévision de propagande du Hezbollah violemment antisémite, mesure prise uniquement sous la pression de politiciens français et du public outrés par les propos de la chaîne. Les discours de haine de Al-Manar ne pouvaient être plus longtemps ignorées par les lois françaises strictes sur l’antisémitisme. Le point de rupture dans la politique française sera l’assassinat du premier ministre Rafik Hariri le 14 Février 2005 et surtout ami intime de Jacques Chirac.

La France a alors réagi en adoptant une position plus ferme face au Hezbollah. Le 29 Août, s’adressant aux ambassadeurs français, Chirac a insisté sur le fait que tous les aspects de la résolution 1559 devaient être mis en application. Le ministre des Affaires Étrangères français, Douste-Blazy le répéta quelques jours plus tard dans une interview au quotidien Asharq Al Awsat. Catherine Colonna, Ministre des Affaires Européennes, alla dans le même sens en condamnant les actions illégales et violentes du Hezbollah à l’encontre d’Israël.

Mais pour ce qui est d’inscrire le Hezbollah sur la liste des organisations terroristes de l’Union Européenne, la France traîne des pieds. Le Hezbollah est un parti politique dit la France et le déclarer comme organisation terroriste risque de déstabiliser le Liban. Encore aujourd’hui la France hésite à lier le mot terrorisme au Hezbollah.

Gérard Araud, ambassadeur de France en Israël, a déclaré le 27 Septembre que la France veut donner au Hezbollah «une place dans le processus démocratique et lui faire comprendre que dans ce processus démocratique il n'y a pas de place pour les armes et le terrorisme». Il a continué en disant que placer le Hezbollah sur la liste des terroristes ne changerait rien mais serait une occasion pour le monde arabe d’y voir «un complot américano-sioniste». La France «ne veut pas leur donner ce plaisir».

Enfin, l’année dernière l’Iran a menacé de réactiver son mortel employé, le Hezbollah, si la France devait prendre une position plus dure à son égard au Conseil de Sécurité des Nations Unies.

Ceci peut expliquer pourquoi le 19 Janvier 2006, le président Chirac dans une déclaration sur le terrorisme a déclaré qu’en cas d’attaque terroriste contre les alliés français (les monarchies du Golfe Persique essentiellement) et/ou les intérêts nationaux (dont les équipements pétroliers) la France pouvait avoir recours à un usage du nucléaire. Le message était clairement adressé à l’Iran et au Hezbollah.

Depuis le début du conflit au Liban le 12 Juillet, après que le Hezbollah ait tué 8 soldats israéliens et en enlevé 2 autres, les réactions de la France ont été diverses et variées. Alors que Chirac a critiqué Israël pour un usage de la force disproportionné, il a aussi dit qu’il n’y avait pas de solution à long terme sans désarmer le Hezbollah le plus rapidement possible.

Alors qu’il visitait Haïfa, Douste-Blazy le ministre des affaires étrangères a été obligé de s’abriter suite à une attaque de roquettes lancées par le Hezbollah, un événement qui a peut être renforcé les résolutions françaises. Douste-Blazy a dit alors «la première des conditions pour un cessez-le-feu est bien sûr le désarmement du Hezbollah». Il ne reste plus qu’à attendre de voir ce que va faire la France!

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